Fülszöveg
Il fut l'ami d'enfance de Camille Desmoulins, picard comme lui, et son ennemi intime ; il fut le collaborateur de Rivarol et le confident de Mirabeau ; on a dit de lui qu'il avait été le plus spirituel des pamphlétaires de la Révolution. Pourtant, aujourd'hui, François Suleau est bien oublié. C'est tout juste si l'on veut bien garder le souvenir de sa mort, le jour meme ou meurt la monarchie, le 10 aout 1792, devant les Tuileries assiégiées, quand, pris a parti par Théroigne de Méricourt, il est massacré par la foule.
Mais cette fin théâtrale, que Suleau lui-meme avait pressentie, sinon désirée, ne doit pas éclipser l'ouvre du pamphlétaire, si riche et si vivante. Homme des Lumieres, Suleau se révele un fervent partisan d'une monarchie paternelle : par tous les moyens, il cherche a préserver le pacte qui, unissant le roi et son peuple, fait de la nation un corps politique sain et stable. Mais Suleau est lucide aussi et ne se cache pas ses propres désillusions : il dénonce la...
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Il fut l'ami d'enfance de Camille Desmoulins, picard comme lui, et son ennemi intime ; il fut le collaborateur de Rivarol et le confident de Mirabeau ; on a dit de lui qu'il avait été le plus spirituel des pamphlétaires de la Révolution. Pourtant, aujourd'hui, François Suleau est bien oublié. C'est tout juste si l'on veut bien garder le souvenir de sa mort, le jour meme ou meurt la monarchie, le 10 aout 1792, devant les Tuileries assiégiées, quand, pris a parti par Théroigne de Méricourt, il est massacré par la foule.
Mais cette fin théâtrale, que Suleau lui-meme avait pressentie, sinon désirée, ne doit pas éclipser l'ouvre du pamphlétaire, si riche et si vivante. Homme des Lumieres, Suleau se révele un fervent partisan d'une monarchie paternelle : par tous les moyens, il cherche a préserver le pacte qui, unissant le roi et son peuple, fait de la nation un corps politique sain et stable. Mais Suleau est lucide aussi et ne se cache pas ses propres désillusions : il dénonce la faiblesse de Louis XVI et l'inconscience de Marie-Antoinette, « Madame Déficit » ; il transforme La Fayette en lilliputien et raille Mirabeau sur son lit de mort; il fait le voyage a Coblence et revient dégouté par la bassesse des émigrés prets a se vendre a l'étranger. Et finalement, dans un ultime paradoxe, ce royaliste viscéral qui a compris que la Révolution est irréversible finit par souhaiter un bain de sang qui purifierait la France : en meme temps qu'il prévoit la dictature des Jacobins et la Terreur, il sait qu'il sera la premiere victime.
On trouvera réunis ici les textes qui ont fait de Suleau l'une des personnalités les plus populaires des premieres années de la Révolution. Tous les tons, tous les genres s'y melent, le calembour et la parabole, le portrait et la caricature.
Ce que l'on retiendra surtout, c'est la sincérité de Suleau, cette sincérité passionnée et véhémente qui le mene a la mort, et nous livre aujourd'hui un témoignage exceptionnel sur les premieres années, décisives politiquement et pourtant trop souvent négligées, de la Révolution.
Maître de conférences a l'Université de Paris-Sorbonne (Paris IV), Nathalie Basset a soutenu sa these sur les «Physiologies» au dix-neuvieme siecle et s'intéresse particulierement aux sources et aux formes de la contestation.
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