La prostitution et la police des moeurs au XVIIIe siécle

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Érica-Marie Benabou nous a quittés en 1985, alors qu'elle venait d'achever cet ouvrage qu"'il conviendrait - écrit Pierre Goubert - de déguster avec lenteur, esprit et tendresse, comme l'ont reçu ceux et celles qui l'ont encouragé a naître et pieusement aidé dans son éclosion finale".
Au prix d'un formidable travail de recherche dans ime masse considérable de documents en grande partie ignorés ou inexploités, elle nous a livré une enquete absolument neuve et passionnante sur "les fiUes de débauche" - les "filles du monde", comme on disait alors -, leurs maquerelles et leurs clients. Elle nous offre en meme temps, grâce aux savoureux rapports des inspecteurs de police, ime vision surprenante de la police au xviir siecle. Il est vrai que celle-ci et la prostitution étaient tres liées; maquerelles et /prostimées fournissant, en échange de leur tranquillité, d'abondants renseignements sur les "consommateurs", notamment sur les nobles, les magistrats, les financiers et le clergé,... Tovább

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Érica-Marie Benabou nous a quittés en 1985, alors qu'elle venait d'achever cet ouvrage qu"'il conviendrait - écrit Pierre Goubert - de déguster avec lenteur, esprit et tendresse, comme l'ont reçu ceux et celles qui l'ont encouragé a naître et pieusement aidé dans son éclosion finale".
Au prix d'un formidable travail de recherche dans ime masse considérable de documents en grande partie ignorés ou inexploités, elle nous a livré une enquete absolument neuve et passionnante sur "les fiUes de débauche" - les "filles du monde", comme on disait alors -, leurs maquerelles et leurs clients. Elle nous offre en meme temps, grâce aux savoureux rapports des inspecteurs de police, ime vision surprenante de la police au xviir siecle. Il est vrai que celle-ci et la prostitution étaient tres liées; maquerelles et /prostimées fournissant, en échange de leur tranquillité, d'abondants renseignements sur les "consommateurs", notamment sur les nobles, les magistrats, les financiers et le clergé, particulierement pisté par la police.
Environ vingt mille "permanentes" actives s'adonnaient a la prostitution dans la seule ville de Paris, soit quelque treize pour cent des Parisiennes en "âge d'amour". Encore faudrait-il y ajouter bon nombre d' "occasionnelles" : coiffeuses, marchandes de mode, bouquetieres, blanchisseuses, etc. Cela donnerait en 1987 plus de cent mille dames vénales, banlieusardes exclues. C'est dire l'importance, pour l'histoire d'une société, de cette véritable autopsie du commerce de l'amour au xviir siecle. En faisant vivre pour la premiere fois, avec une précision quasi affectueuse, des milliers de filles soumises a des douzaines d'infâmes et parfois spirituelles maquerelles, a des centaines de proxénetes de tout ordre et a d'autres milliers de clients, en restituant avec bonheur l'action de la police des mours, en analysant enfin l'attitude de la justice, de l'Église, des moralistes, des utopistes vis-a-vis de la prostitution, Érica-Marie Benabou a apporté une contribution essentielle, vivante, érudite et tres concrete a la connaissance des mours, des mentalités ^t de la vie quotidieniie dans la France prérévolutionnaire.
Érica-Marie Benabou "était a h. fois sévrienne, parisienne, historienne et secretement «.littéraire», comme on disait naguere. Elle était aussi une enseignante hors pair, dont la rigueur et le sourire attiraient les meilleurs". Ainsi l'évoque Pierre Goubert qui fut le directeur de sa these de doctorat de lettres, destinée a l'Université de Paris-I, que nous avons légerement réduite, surtout dans son appareil de notes et de statistiques, pour liii permettre d'atteindre le vaste public qu'elle mérite. Vissza